« L’homme qui lisait des livres » de Rachid BENZINE

Informations 

Titre : L’homme qui lisait des livres

Auteur : Rachid Benzine

Éditeur : Julliard 

Nombre de pages : 128 pages

Formats et prix : broché 18 € / numérique 13.99 €

Date de publication : 21 août 2025

Genre : littérature générale

Résumé

Entre les ruines fumantes de Gaza et les pages jaunies des livres, un vieil homme attend. Il attend quoi ? Peut-être que quelqu’un s’arrête enfin pour écouter. Car les livres qu’il tient entre ses mains ne sont pas que des objets – ils sont les fragments d’une vie, les éclats d’une mémoire, les cicatrices d’un peuple.
Quand un jeune photographe français pointe son objectif vers ce vieillard entouré de livres, il ignore qu’il s’apprête à traverser le miroir.  » N’y a-t-il pas derrière tout regard une histoire ? Celle d’une vie. Celle de tout un peuple, parfois « , murmure le libraire. Commence alors l’odyssée palestinienne d’un homme qui a choisi les mots comme refuge, résistance et patrie.
De l’exode à la prison, des engagements à la désillusion politique, du théâtre aux amours, des enfants qu’on voit grandir et vivre, aux drames qui vous arrachent ceux que vous aimez, sa voix nous guide à travers les labyrinthes de l’Histoire et de l’intime. Dans un monde où les bombes tentent d’avoir le dernier mot, il nous rappelle que les livres sont notre plus grande chance de survie – non pour fuir le réel, mais pour l’habiter pleinement. Comme si, au milieu du chaos, un homme qui lit était la plus radicale des révolutions.

Mon avis

Quand la mémoire se fait résistance

« L’homme qui lisait des livres » de Rachid Benzine ne se contente pas de nous raconter une histoire : ils nous prend par la main pour nous conduire au cœur d’une mémoire, d’un peuple, d’un combat.. Entre les ruines de Gaza et les pages fragiles d’une bibliothèque abîmée par la guerre, un vieil homme témoigne. Son arme n’est pas le fusil, mais la parole, le livre, le souvenir.

« Les livres, dans la boutique, forment un patchwork de couleurs fanées. Des reliures en cuir brun, rouge, vert, des couvertures de papier jaunies. »

Un récit entre l’intime et l’Histoire

Le roman s’ouvre sur une rencontre : celle d’un jeune photographe français et d’un vieil homme palestinien entouré de ses livres. Derrière ce face-à-face se tisse un récit où se mêlent mémoire collective et trajectoire personnelle. À travers la voix de ce libraire, c’est tout un peuple qui parle : l’exode, la prison, la désillusion politique, les amours et les pertes irréparables. Chaque fragment de vie prend une résonance universelle et nous rappelle que l’Histoire avec un grand H n’existe qu’à travers les histoires individuelles.

Ce roman est une odyssée, mais une odyssée immobile : l’homme reste assis, entouré de ses livres, et pourtant, par la force de ses mots, il nous fait voyager dans le temps et dans la mémoire de la Palestine.

La puissance des livres comme refuge et résistance

Le thème central du roman, comme l’indique son titre, est la place des livres. Ils ne sont pas seulement des objets à conserver, mais des témoins de ce qui a été vécu. Ils deviennent refuge dans l’exil, résistance face à l’effacement, patrie pour ceux qui en ont été privés.

Rachid rappelle que la littérature ne sauve pas du réel, mais qu’elle permet de l’habiter autrement. Dans ce chaos où les bombes veulent imposer le silence, le vieil homme prouve que lire est un acte radical, presque révolutionnaire : celui de continuer à exister, à penser, à transmettre.

« Tu crois que les mots vont nous sauver, Nabil ? me demandaient mes amis. Je leur répondais que oui. Je n’en suis plus sûr. Je dirais qu’ils sauvent en silence. La réalité est la même, rien ne renverse l’oppression, mais l’esprit, lui, s’envole. »

Une plume à la fois sobre et poétique

Le style de Rachid Benzine se distingue par une écriture limpide, accessible, mais toujours portée par une poésie discrète. Les phrases sont sobres, presque épurées et c’est cette simplicité qui les rend percutantes. Il n’a pas besoin d’effets de style pour toucher : chaque mot semble choisi pour aller droit au cœur. Le rythme alterne entre le récit du vieil homme et les réflexions du jeune photographe, créant une polyphonie qui nous entraîne sans jamais nous perdre.

On sent la rigueur de l’essayiste chez Benzine, mais aussi la sensibilité du romancier qui préfère l’émotion brute à la démonstration.

Ce qui rend la narration encore plus percutante, c’est le choix de l’auteur d’employer le « Tu ». Par ce procédé, le vieil homme interpelle le jeune photographe, mais aussi le lecteur. On ne lit pas seulement une histoire : on est directement impliqué, comme si cette mémoire nous était confiée personnellement.

Ce que l’on retient de cette lecture

Ce roman est bouleversant, non par des effets spectaculaires, mais parce qu’il met en lumière la fragilité et la force de l’humain. On en ressort avec le cœur serré, conscient d’avoir entendu une voix qui dépasse les frontières. La douleur est palpable, mais il y a aussi une lumière : celle de la transmission, de la mémoire, de la croyance dans le pouvoir des mots.

L’émotion naît de ce contraste permanent entre la violence du monde extérieur et la douceur du geste de lire. Comme si, face au fracas des bombes, tourner une page devenait un acte de survie.

Les forces et les limites du roman

Parmi les grandes forces du texte, il faut souligner la justesse de la voix du vieil homme : elle est crédible, incarnée, profondément humaine. Le choix de la mise en abyme (un photographe qui capte une mémoire) donne une dimension supplémentaire, une réflexion sur le regard et la transmission.

En revanche, certains lecteurs pourront trouver que le roman est davantage un récit méditatif qu’une véritable intrigue romanesque. L’action est minimale, l’essentiel repose sur la parole et la mémoire. Ce n’est pas une faiblesse en soi, mais cela peut déconcerter ceux qui cherchent un récit plus classique.

Un livre qui résonne longtemps

« L’homme qui lisait des livres » est un roman court, mais intense, qui résonne longtemps après sa lecture. Rachid Benzine y déploie une œuvre à la fois intime et universelle, qui rappelle que dans un monde marqué par la violence, lire et transmettre restent des actes essentiels.

Ce livre n’est pas seulement un hommage aux livres : c’est un plaidoyer pour la mémoire, la dignité et la résistance par les mots. Une lecture à la fois nécessaire et bouleversante, qui nous rappelle que parfois, au milieu des ruines, un homme assis avec ses livres est le plus puissant des symboles.

« Il est plus facile de parler des horreurs du monde que de la beauté des choses. »

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En bref…

Ce qui m’a poussé à ouvrir ce livre : il mêle deux thèmes qui m’attirent beaucoup, la mémoire des peuples à travers l’Histoire et la place des livres comme refuge et arme de résistance. 

Auteur connu : j’avais entendu parler de Rachid Benzine sans avoir jamais pris le temps de le lire. C’est chose faite et c’est une très belle découverte. 

Émotions ressenties lors de la lecture : tristesse, peur, angoisse, colère, indignation, admiration. 

Ce que j’ai moins aimé : RAS

Les plus : la place centrale des livres, la puissance de la narration, la plume. 

Si je suis une âme sensible : c’est une lecture forte, parfois dure. Les descriptions ne sont pas violentes au sens cru du terme, mais la charge émotionnelle est très lourde. Ce livre ne laisse pas indemne, mais il apporte une lumière qui vaut le détour.

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