
Titre : Tout ce qui est solide se dissout dans l’air
Auteur : Darragh McKeon
Éditeur : Belfond et 10-18 pour la version poche
Nombre de pages : 456 pages pour la version poche
Formats et prix : broché 23 € / poche 9.20 € / numérique 12.99 €
Date de publication : 20 août 2015 pour la version brochée /16 mars 2017 pour la version poche
Genre : littérature irlandaise

Dans un minuscule appartement de Moscou, un petit prodige de neuf ans joue silencieusement du piano pour ne pas déranger les voisins.
Dans une usine de banlieue, sa tante travaille à la chaîne sur des pièces de voiture et tente de faire oublier son passé de dissidente.
Dans un hôpital non loin de là, un chirurgien s’étourdit dans le travail pour ne pas penser à son mariage brisé.
Dans la campagne biélorusse, un jeune garçon observe les premières lueurs de l’aube, une aube rouge, belle, étrange, inquiétante.
Nous sommes le 26 avril 1986. Dans la centrale de Tchernobyl, quelque chose vient de se passer.

26 avril 1986. Tchernobyl. Une date et un lieu, qui, mis ensemble, font frémir n’importe quel être humain. Darragh utilise cette catastrophe comme toile de fond convaincante afin d’explorer la vie derrière le rideau de fer à la fin des années 80 et dans les années 90, lorsque, malgré les premières promesses de la Glasnost, rien ne change vraiment pour le citoyen russe moyen. Le lecteur découvre les retombées de la catastrophe (sociales, financières, physiques, psychologiques, émotionnelles et nucléaire) sur la vie des gens ordinaires. Nous suivons un groupe de personnages gravitant les uns autour des autres.
Maria, ancienne journaliste dissidente à Moscou travaille aujourd’hui dans une usine, gagnant à peine de quoi payer le loyer de l’appartement qu’elle partage avec sa sœur Alina, blanchisseuse. Le fils d’Alina, Evgeni, 9 ans, espère remporter une bourse au conservatoire de musique. Quant à l’ex-mari de Maria, Grigory, 36 ans et chirurgien chef, il est l’un des premiers envoyés sur le site de Tchernobyl après la catastrophe. Artiom a 13 ans et vit dans un village non loin de Tchernobyl. Le 27 avril, il admire le ciel d’une couleur de lave. Il sera déplacé avec sa famille, considéré comme un pestiféré, et verra son père mourir des radiations. Chaque personnage est juste et attachant.
« Après les deux premières semaines, les officiels ont décidé de ne pas remplacer les liquidateurs, pour ne pas en sacrifier d’autres. Au cours des réunions d’organisation du travail de la journée, chaque matin, ils calculaient de combien de vies ils avaient besoin pour telle tâche spécifique. Deux vies pour ceci, quatre pour cela. C’était comme un cabinet de guerre, quand les hommes se prennent pour Dieu. Le pire, c’est que cela n’a servi à rien. Les premiers liquidateurs ont dû malgré tout être remplacés, car à la fin, ils étaient trop malades pour continuer le travail. »
Darragh nous propulse dans l’Union Soviétique au moment où elle s’écroule. Tchernobyl en aura accéléré sa chute. Il met le doigt sur l’atmosphère particulière en Union Soviétique, l’impact à la fois de la catastrophe et de la chute du système sur le quotidien des habitants (de manière directe ou indirecte en fonction des personnages). Il n’oublie pas la nature, perturbée par l’explosion, les descriptions de la forêt revêtant des couleurs automnales du jour au lendemain à cause des radiations, ou encore l’abatage systématique des animaux de compagnie m’ont beaucoup marquée, même si j’en avais déjà entendu parler. Les vaches dans les prés ont les oreilles qui saignent. Tout est bouleversé, en danger, et pourtant, la vérité est dissimulée.
« Tout ce qui est solide se dissout dans l’air » est une épopée historique et humaine mélangeant intimité émotionnelle et vastes paysages. Si le début du roman attaque de manière simple et plutôt intime, avec Evgeni se faisant agresser par des camarades de classe dans le métro, la catastrophe remet bien vite les pendules à l’heure, le présent devient urgent, le futur totalement incertain.
La plume de Darragh est fluide, étoffée et minutieuse. Il instille beaucoup de détails à son récit, donnant au roman une belle profondeur et une richesse unique. On sent qu’il a fait des recherches et récolté de nombreux témoignages.
J’ai aimé le mélange à la fois d’Histoire, de politique et d’intime. Darragh sait mettre l’accent là où il faut, quand il faut. Le dosage est parfait entre chaque lien, évitant, d’une part, l’ennui du lecteur, et permettant de garder un bon rythme de lecture. Chaque lecteur y trouve son compte, quel que soit le volet qui l’intéresse. Pour ma part, j’ai préféré les moments parlant de l’accident et de ses conséquences, mais je dois avouer que je me suis prise au jeu des destins, et je me suis attachée aux personnages, espérant de tout cœur qu’ils s’en sortent.
La position officielle du gouvernement sur Tchernobyl est stupéfiante : rien n’est grave et tout est sous contrôle. Flagrant mensonge ! Grigori essaye de prévenir la population, mais il est bien vite muselé par le KGB. Avec Maria, à Moscou, nous découvrons le difficile quotidien des habitants pour joindre les deux bouts. Les salaires stagnent et les prix ne cessent d’augmenter (ça vous rappelle quelque chose ?). La vie de Maria, Alina et Evgeni est une fenêtre sur le régime communiste oppressif. Il y a des courants sous-jacents de peur et de suspicion. Dans l’usine où travaille Maria, la révolte et la grève sont latentes.
Il semblerait que les nuages toxiques existaient bien avant l’arrivée de Tchernobyl…
Le titre est tiré d’un extrait de citation de Karl Marx et Friedrich Engels, « Manifeste communiste ». Un mot de la couverture de la version poche, que je trouve superbe.
Un premier roman riche et d’une beauté absolue que je vous conseille.
« C’est le Parti qui a fait de moi ce que je suis, qui a fait de ce pays ce qu’il est. Je me suis toujours fié à son jugement. Et ce n’est pas un incendie dans une centrale qui y changera quelque chose. »
#DarraghMcKeon #Toutcequiestsolidesedissoutdanslair


Ce qui m’a poussé à ouvrir ce livre : mon œil a été attiré par la couverture et j’ai été happée par le résumé.
Auteur connu : pas du tout ! Je l’ai rencontré cette année à la fête du livre de Saint-Étienne, l’occasion de découvrir son univers. Il a publié deux romans. « Tout ce qui est solide se dissout dans l’air » est le premier, salué par la critique . « Le dimanche du souvenir » est sorti en fin d’été. Je pense me laisser tenter.

Émotions ressenties lors de la lecture : peur, angoisse, colère, envie, espoir, stupéfaction, dégoût.
Ce que j’ai moins aimé : pas grand chose. Peut-être la fin, pas assez développée pour moi. Mais cela reste à la marge.
Les plus : l’ambiance, les petits détails, les différents volets étudiés, la plume, les personnages.
Si je suis une âme sensible : RAS


Ah Sonia tu m’as encore donné envie alors que j’en ai plein à lire. Donc je vais garder le nom de l’auteur. Effectivement t c’est un sujet qui nous parle car en France aussi le silence était de mise. Vous ne craignez rien le nuage n’ a fait qu’éviter la France. Beaucoup de problèmes de thyroïde ont suivis. Bon restons tout de même positif. Bonne fin de journée et bon dimanche. Bise à la famille
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Coucou Domi. Oui, j’habitais dans le nord est à l’époque. Le gentil nuage s’était arrêté à la frontière allemande. Sympa. Bref ! Bises bonne semaine.
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Bolla
Belle photo Sonia encore un auteur qui semble sympa. Il parle un peu français ? Je note cette idée de livre
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Coucou Olivier. Il parle un peu français, mais bon, il est limité lol. J’ai baragouiné en anglais pour lui expliquer pourquoi Tchernobyl m’intéressait. Ça devait être drôle à voir et surtout à entendre lol ! Bises.
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J’ai adoré ce bouquin, je ne savais pas qu’il avait écrit un autre roman cette année ! Je vais me le noter, merci 🙂
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Avec plaisir ! Bonne lecture ! Tu me diras ce que tu en as pensé, je vais me laisser tenter aussi je pense.
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Je l’ai lu à sa sortie et je l’ai beaucoup apprécié.
Je vais découvrir son nouvel écrit.
Merci beaucoup 🙏🏻👍
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Merci à toi pour ton commentaire. Je pense que nous sommes beaucoup à vouloir se laisser tenter par son nouveau roman ! Une belle plume à découvrir.
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