« Oh, oh, ça dit l’père, ça pète ou quoi ? » de Yannick ABRAHAM

Informations 

Titre : Oh, oh, ça dit l’père, ça pète ou quoi ?

Auteur : Yannick Abraham

Éditeur :  Auto édition avec la participation de la Collectivité Territoriale de SPM

Nombre de pages : 179 pages

Date de publication : octobre 2021

Genre : littérature régionale

Résumé

Avec son « histoire pas vraie, mais pas fausse non plus », Yannick Abraham rend un hommage émouvant à une figure locale qui a marqué nos îles : « De Gaulle » ! Mais il ne s’agit pas du De Gaulle de Londres mais du « De Gaulle du P’tit Barachois » ! Qui l’a côtoyé garde en mémoire le souvenir d’un personnage truculent, généreux, le cœur sur la main, prêt à partager…même ce qu’il n’a pas !

L’histoire imaginée par Yannick Abraham met en scène d’autres protagonistes que vous prendrez plaisir à découvrir dans une histoire intégralement racontée en « parler saint-pierrais » ! Un travail de titan que Yannick a réalisé en recensant toutes les expressions – souvent fleuries – qui colorent les conversations des Saint-Pierrais purs et durs !

Mon avis

Un OVNI littéraire venu du large.

D’ordinaire, mes lectures me promènent dans des intrigues bien huilées, des romans ciselés ou des thrillers haletants. Mais cette fois… cette fois, c’est différent. Je me suis retrouvée catapultée à Saint-Pierre-et-Miquelon, sans prévenir, sans bagage, et surtout, sans dictionnaire. Parce que oui, « Oh, oh, ça dit l’père ça pète ou quoi ? » de Yannick Abraham, c’est pas juste un roman. C’est une immersion totale, brute et jubilatoire, dans une langue, une culture et une mentalité à chniquer sans modération.

Et puisque ce livre est hors norme, ma chronique le sera aussi. Plutôt qu’un simple avis, je te propose une discussion, comme si toi et moi, on se retrouvait autour d’un café bien chaud, à essayer de démêler ce qu’on vient de lire. Accroche-toi, on embarque !

A noter que les photos ne sont pas tirées du roman.

Saint Pierre et Miquelon

— T’as déjà mis les pieds à Saint-Pierre-et-Miquelon ?
— Bah non, pourquoi ?
— Parce que je viens d’y faire un tour sans bouger de mon fauteuil !
— Ah, t’as encore lu un bouquin chelou ?
— Pas chelou, savoureux ! « Oh, oh, ça dit l’père ça pète ou quoi ? » de Yannick Abraham.

Je la vois froncer les sourcils, hésitante. Faut dire que le titre en impose. Ça pète ou quoi ? Je jubile déjà.

— Attends, c’est un roman ou un guide de survie en terre inconnue ?
— Un peu des deux, figure-toi. C’est une plongée en plein cœur de Saint-Pierre-et-Miquelon, mais en mode brut de décoffrage. On suit trois potes, Charlie, Bill et Joe, qui passent leur temps à chasser, à pêcher et à refaire le monde. Enfin, à refaire Saint-Pierre-et-Miquelon, ce qui est déjà pas mal.

Elle plisse les yeux. Je sens que je vais devoir donner du biscuit.

— Ça parle de quoi, en vrai ?
— Ça parle de rien, et pourtant de tout. De souvenirs, de traditions, de coups de gueule, et surtout, de ce fichu parler Saint-Pierrais qui, crois-moi, vaut son pesant de morue séchée !

Je dégaine mon arme secrète, une citation bien sentie.

« Charlie refuse de reposer le cul dans le fauteuil défoncé du salon. Il ne veut pas froisser ses fringues de sortie. Alors il s’assoit sur une chaise toujours calée au coin du poêle à charbon. De plus, il reste un peu de braise de tantôt. C’est impeccable avant de sortir avec ce poudrin de nordet qui n’a pas calmi. »

Elle me regarde, interloquée.

— Attends… quoi ?
— T’as bien entendu. Un « poudrin de nordet », c’est de la neige qui tombe avec des forts vents de nord-est. Et « tantôt », ça veut dire « tout à l’heure ».

Elle éclate de rire.

— Ah ouais, faut le mode d’emploi, quoi.
— Au début, ouais, mais rapidement, tu chopes le truc. Et après, tu te surprends à avoir envie de parler pareil. Ça a du caractère, c’est imagé, et surtout, c’est vivant !

— Donc, c’est juste une suite de dialogues en patois local ?
— Pas que ! C’est surtout un hommage. Un hommage à un type qu’on appelait « De Gaulle du P’tit Barachois ». Mais pas le De Gaulle que tu crois. Celui-là, c’est une figure locale, un gars haut en couleur, généreux, qui faisait partie du décor. C’est l’oncle de l’auteur, le fameux Charlie que l’on retrouve entre les pages.

Je vois que ça l’intrigue.

— Et alors, verdict ?
— Verdict ? Ça change de tout ce que j’ai lu. Ça sent la rudesse de l’hiver, les cafés où tout le monde se connaît, les engueulades et les amitiés sincères. C’est drôle, ça cogne parfois, et c’est surtout un témoignage sur une culture qui, bien que française, est totalement unique.

Je poursuis, enthousiaste :

« Ce matin, le soleil s’est levé avec le nez sale. Les quelques nuages noirs qui se déplacent rapidement le barbouillent. La mer a une couleur qui s’éloigne du bleu habituel. Elle est d’un bleu dur qui donne une idée de sa température. »

St pierre et Miquelon

Elle hoche la tête, pensive.

— C’est vrai que c’est imagé… Mais t’es sûre que c’est pas un peu exagéré, leur façon de voir les choses ?
— Oh que non ! Écoute ça :

« T’as raison, nous les Saint-Pierrais depuis la nuit des temps on a toujours été à la montagne. Il a suffi qu’il y ait un jour un con qui débarque ici et qui dise qu’il a découvert une forêt boréale pour que tout le monde embarque là’d’dans. Y paraît même que c’est la seule de France, ne rigole pas l’père. »

Elle rigole.

— Ça sent le vécu !
— Exactement ! Et ce qui est génial, c’est que le livre se termine avec des photos. Ça fait vraiment carnet de voyage, tu vois ? Un mélange de roman, de témoignage et d’hommage à ces îles paumées mais pleines de caractère.

Elle tourne son mug entre ses doigts, pensive.

— Dis-moi… t’as pas failli t’engotter¹ avec tous ces mots bizarres, au début ?
— Ah si ! Premier chapitre, j’ai cru que j’allais y passer. Mais une fois que tu te laisses porter, c’est du pur bonheur.

Elle rit.

— Bon, si ça m’apprend à dire autre chose que « il fait frisquet » quand il gèle, pourquoi pas.

— Tu verras, dans quelques jours, tu diras « ça poudrine sec » sans même t’en rendre compte !

Elle attrape son téléphone.

— T’as boucanné² ton exemplaire ou tu peux me le prêter ?

Je souris, victoire en poche.

Finalement, « Oh, oh, ça dit l’père ça pète ou quoi ? » n’est pas qu’une simple lecture. On en ressort avec l’impression d’avoir arpenté les ruelles de Saint-Pierre, d’avoir trinqué avec les habitués du café du coin, d’avoir senti le vent glacé sur nos joues. Et surtout, on repart avec une ribambelle d’expressions savoureuses et l’envie irrépressible de les placer dans la conversation. Alors, prêt à une immersion saint-pierraise, accompagnée d’un thé chauffé dans le tic³ ? Et sans avoir les michepouettes ?

¹ : t’étouffer      ² : tout utilisé    ³ : bouilloire   : peur

   #YannickAbraham    #CollectivitéTerritorialedeSPM

oh oh ça dit l'père

En bref…

Ce qui m’a poussé à ouvrir ce livre : l’envie de voyager au bout du monde sans bouger de chez moi !

Auteur connu : totalement inconnu au bataillon !

Émotions ressenties lors de la lecture : amusement, étonnement, envie, curiosité.

Ce que j’ai moins aimé : RAS. Après, si on n’accroche pas à l’humour ou au parler local, on peut vite se sentir perdu.

Les plus : l’immersion totale, la mise en lumière de cette culture saint-pierraise, l’humour, l’authenticité.

Si je suis une âme sensible : RAS

3 réflexions sur “« Oh, oh, ça dit l’père, ça pète ou quoi ? » de Yannick ABRAHAM

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