Dans notre société ultra-connectée où les réseaux sociaux ont la part belle dans notre vie virtuelle, la littérature arrive-t-elle à s’y faire une place ? A en tirer des bénéfices ? On essaye de creuser la question ?
Internet, un formidable outil
Les réseaux sociaux (Twitter, Instagram ou encore Facebook) sont un lieu où les écrivains peuvent promouvoir leur travail, toucher leur lectorat ou encore s’exprimer. On y parle de tout : d’actualité, de politique, évidemment d’art et de littérature, sous des formes variables, qui dépendent d’ailleurs du réseau utilisé. Beaucoup de lecteurs et d’auteurs jouent avec les codes des réseaux sociaux où ils peuvent être très présents. Distiller anecdotes, jeux de mots ou réflexions sur le quotidien sur Facebook ou Twitter, publier des images étonnantes ou des photos de livres sur Instagram, permettant à la fois de mettre joliment en scène des romans et se souvenir de ses lectures.
Quoi qu’on en dise, les réseaux sociaux ont remis l’écrit dans nos vies, en tant que vecteur d’échanges et d’expression.
L’écrivain Clément Bénech souligne judicieusement : « On touche quasiment à la forme la plus pure de ce qu’est l’écriture, l’activité littéraire : quelqu’un fait des phrases, d’autres les lisent ».
Les réseaux deviennent un formidable terrain de partage, un vase clos nouveau et immédiat, où auteurs et lecteurs communiquent et interfèrent, les premiers diffusent leurs idées, leurs prochain projet de roman, font des sondages quant au choix de leur future couverture, les seconds chroniquent, donnent leur avis, votent, conseillent. Les libraires et les bloggeurs se sont bien évidemment greffés à l’aventure. Les bloggeurs ont d’ailleurs largement profité du développement de ces plateformes, à l’image des «bookstagram» sur Instagram qui ont changé la donne de la promotion et de la critique littéraire. Tout le monde travaille à faire découvrir des livres.
L’engagement et la contestation sont très présentes sur les réseaux sociaux. Et le monde de la littérature n’y a pas échappé, puisque de nombreux auteurs ont saisis l’occasion en 2018 pour réclamer un meilleur traitement financier, regroupés sous le #payetonauteur qui a lancé un mouvement inédit dans ce milieu.
Double tranchant
Mais attention, la machine à buzz est à double tranchant. Star d’un jour, déchue le lendemain, tout est instantané avec les réseaux.
« Blood Heir », roman signé par Amélie Wen Zhao, était présenté par son éditeur, Delacorte Press (Random House), comme la prochaine sensation de la catégorie « Young Adult ». Sauf que des critiques très négatives, et un début de polémique quant à des personnages noirs et une évocation de l’esclavage, ont poussé l’auteure et l’éditeur à repousser la parution du livre.
En effet, en quelques semaines, c’est un flot d’articles négatifs qui s’est abattu sur le titre, en provenance de la communauté de lecteurs et de blogueurs qui a pu lire « Blood Heir » en avant-première. Après quelques jours de discussions et un début de polémique sur les réseaux sociaux, l’auteure a pris les devants et a annoncé, sur Twitter, l’annulation de la parution en juin, pour un report à une date ultérieure.
Méfiance….
Comme n’importe qui sur le web, les littéraires doivent faire attention aux faux profils tenus par des fans ou des farceurs plus ou moins bienveillants. La présence de certaines romancières et romanciers français sur les réseaux sociaux reste peu contrôlée et marginale.
Les éditeurs s’en mêlent….
Les éditeurs sont devenus plus attentifs à ce qui se passe sur internet. Certains phénomènes virtuels s’exportent en livres, à l’image récemment chez Albin Michel du compte Instagram « Amours Solitaires » de Morgane Ortin, ou du compte Twitter @sosadtoday de l’Américaine Melissa Broder dont les Éditions de l’Olivier feront paraître début 2019 l’adaptation en livre. Une reconnaissance littéraire des réseaux sociaux, susceptible d’attirer un nouveau lectorat comme de nouveaux followers. Il semble loin où l’auteur frappait aux portes des maisons d’éditions, son manuscrit papier sous le bras…
Certains éditeurs ont également très bien compris l’intérêt des réseaux sociaux pour assurer leur promotion. La proximité devient bien plus grande avec le lectorat, quoique toujours virtuelle, et un autre canal de communication s’établit, nettement plus direct. Si des maisons historiques telles que Gallimard investissent encore peu ces outils numériques, préférant laisser leurs auteurs libres d’y faire ce qu’ils veulent, d’autres, comme Albin Michel, y déploient toute une stratégie marketing. Des comptes ont été créés pour les grosses romancières et romanciers édités (Bernard Werber, Katherine Pancol, Maxime Chattam entre autres), avec pour principale cible Facebook, le réseau qui dénombre le plus d’adeptes.
La plupart de ces comptes sont cogérés entre des community managers et les écrivains eux-mêmes, qui ont reçu une formation pour s’y autonomiser. Une utilisation des réseaux sociaux qui n’a donc plus rien d’artisanale, au service de la promotion de marques que constituent ces auteurs, dont les pages Facebook comptent chacune plus de 100.000 fans.
Comme l’explique le directeur marketing chez Albin Michel, Mickael Palvin, « une stratégie différenciée et adaptée selon les auteurs est mise en place sur les réseaux deux mois avant la sortie d’un nouveau livre, puis l’accompagne pendant les semaines qui suivent, avec des teasings et des concours ».
Les réseaux sociaux dédiés à la littérature
Lorsque l’on parle de réseaux sociaux, nous pensons immédiatement à Facebook, Twitter ou encore Instagram. Mais il existe des réseaux sociaux uniquement dédiés au monde littéraire : ce sont les réseaux sociaux littéraires (ou RSL). Ils regroupent toute une communauté qui exprime différents points de vue.
S’ouvrant généralement sur l’actualité et les nouveautés littéraires, ces RSL présentent, à peu de chose près, les mêmes fonctionnalités. En effet, que l’on soit membre ou non, nous pouvons avoir accès à toutes les informations relatives au livre : le titre, l’auteur, l’éditeur, le prix, la date de parution, les avis et les notes des lecteurs, des extraits, des mots-clés associés au livre…
Certains proposent même sans besoin d’être abonné des critiques de professionnels, des entretiens audiovisuels avec des auteurs, des lecteurs, qui peuvent être introduits par de courtes présentations des œuvres sous forme de bandes annonces. Parfois, une géolocalisation de l’ouvrage dans les bibliothèques et les librairies à proximité est possible, ainsi que la mention des sites de vente en ligne où se procurer le livre.
Toutefois, lorsque l’on s’abonne, un certain nombre d’options sont proposées, comme celle de pouvoir créer sa propre bibliothèque virtuelle, à l’origine de la plupart des inscriptions.
Cette fonction permet de recenser toutes ses lectures à la fois antérieures, actuelles et futures, tout en les classant selon des critères d’appréciation et en y associant des dates et/ou une progression de lecture. Cette organisation propose à l’abonné une sélection de livres d’après ses thèmes et genres de prédilection et le met en relation avec d’autres membres aux bibliothèques similaires.
En outre, le lecteur peut suivre l’évolution d’un livre choisi, ce qui est particulièrement intéressant lorsqu’il s’agit de connaître la date de parution du livre, mais pas seulement. « Suivre » un livre permet d’être mis au courant lors d’éventuelles nouvelles éditions, des ajouts de notations, de commentaires ou d’extraits, mais également lorsque le livre est « ajouté » par d’autres membres à leur bibliothèque, ce qui permet de découvrir d’autres ouvrages similaires.
Enfin, les membres alimentent un forum consacré à leurs lectures et leurs avis ; des challenges de lectures sont régulièrement organisés et de nombreux quiz sont disponibles.
La littérature s’est approprié le net et a développé tout un monde virtuel sur lequel il faut désormais compter, qui pèse lourd et qui peut se targuer d’une influence non négligeable. Cela n’est pas sans danger, certes, mais les bénéfices retirés sont immenses. Une fois les quelques pièges déjoués et sa place acquise, ce n’est que du bonheur pour chacun des acteurs.
Les possibilités sont vastes, permettant toutes les fantaisies. Et vous, quel est votre rapport avec les réseaux ?
Bonjour Sonia, auteur dont tu as bien voulu me faire une chronique, et peu promu par son éditeur, j’essaie de m’en occuper comme je le peux et depuis que j’ai « mis » mon ouvrage sur Babelio, j’essaie de comprendre leur fonctionnement et je n’y parviens pas…tout comme Simplement pro…j’ai quasiment abandonné l’idée de pouvoir comprendre ces deux sites…Bon week end à toi et merci de tes infos 😉
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Pour être sur les deux en tant que lectrice, j’avoue que « Tout simplement » n’est pas très intuitif. Pas évident de faire sa promotion tout seul pour les auteurs, je le conçois. Bon week end à toi aussi Philippe et merci pour ton passage ! Bises.
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