Hello les bibliophiles, comment allez-vous ? Il y a quelques temps, je vous proposais un article sur Victor Hugo. Aujourd’hui, c’est d’un autre grand écrivain français dont je voulais vous parler : Honoré de Balzac.
Honoré de Balzac est considéré comme le créateur du roman réaliste moderne.
Sa vie :
Honoré est né Balzac à Tours (son père ajoutera la particule propre à la noblesse à partir de 1803), dans un milieu familial assez particulier. Son père, berger albigeois réussi à devenir Secrétaire du Conseil du roi et fait carrière comme directeur des vivres à Tours, puis à Paris. Sa mère, mal mariée à un quinquagénaire, multiplie les liaisons, ayant même un enfant adultérin, vivant dans l’indifférence la plus totale avec ses trois enfants légitimes, Honoré et ses sœurs, Laurence et Laure, « enfants du devoir ».
Balzac s’installe à Paris en 1814 et commence des études de droit tout en travaillant chez un avoué. C’est au cours des années 1820 qu’il décide de devenir écrivain. Ses premières œuvres, écrites sous un pseudonyme (Horace de Saint Aubin), sont un échec.
Il rencontre Laure de Berny en 1821. Elle lui apporte un soutien affectif et matériel. Tour à tour éditeur, imprimeur, journaliste, tenté par une carrière politique, Balzac travaille beaucoup et fréquente journalistes et écrivains. Il crée une imprimerie en 1826, mais elle fera faillite deux ans plus tard et laissera Balzac lourdement endetté. C’est dommage car il a eu une idée révolutionnaire mais trop en avance sur son temps : le livre de poche.
Il continue alors d’écrire des romans. En 1829, son premier roman, « Les Chouans », est publié sous son vrai nom.
A partir de 1832, il correspond avec Ewelina Hańska, une admiratrice polonaise qu’il rencontre pour la première fois en 1833.
Dès 1834, il pense à regrouper ses romans dans un ensemble organisé : ce sera la Comédie Humaine, une œuvre immense, dans laquelle il a voulu peindre les figures saillantes de son époque.
En 1843, il voyage en Europe avec Ewelina, qu’il finira par épouser en mai 1850, quelques mois avant sa mort.
Sa personnalité :
Balzac était considéré comme la plus forte tête commerciale et littéraire du XIXème siècle.
Le monde dans lequel le jeune Balzac a grandi est bien ce théâtre où pullulent des Rastignac, des Nucingen et des Vautrin prêts à tout pour arriver. Comme ses modèles, imaginaires ou réels, comme tous ceux de sa génération, Balzac voulait être célèbre, aimé et satisfaire une ambition nourrie des récits des exploits glorieux du premier des napoléonides.
C’est par le biais de la caricature qu’on réussit à appréhender le mieux la personnalité de Balzac : il en est régulièrement la cible. Son physique et son caractère sulfureux en font un bon sujet. Il ne fait rien non plus pour fuir la publicité. Il est souvent attaqué pour son physique ingrat et son hygiène de vie approximative. Pour se moquer de lui on le représente sans cou : on passe directement du corps à la tête. Il est aussi attaqué pour son côté mondain. Bling bling avant l’heure, on dit qu’il avait des boutons en or à sa redingote. Une canne avec un pommeau d’or et incrusté de turquoises fait beaucoup parler de lui.
Autre attribut le caractérisant, et que l’on retrouve dans les caricatures, sa robe de bure qu’il affectionnait pour ses longues journées de travail et qui est beaucoup plus confortable que la redingote qui le serrait.
Son œuvre :
« La Comédie humaine » est le titre sous lequel Balzac a regroupé un ensemble de plus de quatre-vingt-dix ouvrages (romans, nouvelles, contes et essais) de genres réaliste, romantique, fantastique ou philosophique, et dont l’écriture s’échelonne de 1829 à 1850. On y retrouve tous les traits caractéristiques du romantisme de 1830 : exaltation du moi, dans son génie et ses désirs, dynamisme et fécondité, ambitions et appétits, goût de l’histoire et de l’autobiographie, sens de la poésie et du mystère. Mais en même temps, Balzac se singularise par une aptitude à dépasser cette communauté de sensibilité et de passion par une volonté nouvelle de lucidité et d’explication dans la représentation de la réalité historique et sociale.
Influencé par les naturalistes, Balzac souhaite dresser la nomenclature, la classification des espèces humaines, il veut faire une « histoire naturelle de la société », explorant de façon systématique les groupes sociaux et les rouages de la société, afin de brosser une vaste fresque de son époque susceptible de servir de référence aux générations futures. L’œuvre ne doit pas seulement être la reproduction du monde, elle doit également et surtout en fournir l’explication.
Le titre a été choisi en référence à « la Divine Comédie » de Dante. Mais au lieu d’une entreprise théologique, l’auteur s’est voulu sociologue et a créé un univers non manichéen, où l’amour et l’amitié tiennent une grande place, et qui met en lumière la complexité des êtres et la profonde immoralité d’une mécanique sociale où les faibles sont écrasés tandis que triomphent le banquier véreux et le politicien vénal.
Il est un maître du roman français, dont il a abordé plusieurs genres, du roman philosophique avec « Le Chef-d’œuvre inconnu » au roman fantastique avec « La Peau de chagrin » ou encore au roman poétique avec « Le Lys dans la vallée ». Il a surtout excellé dans la veine du réalisme, avec notamment « Le Père Goriot » et « Eugénie Grandet », il s’agit d’un réalisme visionnaire, que transcende la puissance de son imagination créatrice.
L’auteur décrit la montée du capitalisme et l’absorption par la bourgeoisie d’une noblesse incapable de s’adapter aux réalités nouvelles. Intéressé par les êtres qui ont un destin, il crée des personnages plus grands que nature.
Ses opinions politiques sont ambiguës : s’il affiche des convictions légitimistes en pleine monarchie de Juillet, il s’est auparavant déclaré libéral et défendra les ouvriers en 1840 et en 1848, même s’il ne leur accorde aucune place dans ses romans. Tout en professant des idées conservatrices, il a produit une œuvre admirée par Marx et Engels, et qui invite par certains aspects à l’anarchisme et à la révolte.
Lu et admiré dans toute l’Europe, Balzac a fortement influencé les écrivains de son temps et du siècle suivant. Le roman « L’Éducation sentimentale » de Gustave Flaubert est directement inspiré du « Lys dans la vallée », et « Madame Bovary », de « La Femme de trente ans ». Le principe du retour de personnages évoluant et se transformant au sein d’un vaste cycle romanesque a notamment inspiré Émile Zola et Marcel Proust.
Balzac en chiffres
« La comédie humaine » : 91 romans achevés, 46 restés à l’état de projet, plus de 2 000 personnages, dont environ 500 réapparaissent dans plusieurs romans.
Eugène de Rastignac, l’un des ses plus célèbres personnages, apparaitra 25 fois.
3 grands ensembles : Études de mœurs, Études philosophiques et Études analytiques.
3 ouvrages seront publiés à titre posthume : « Les Paysans », resté inachevé et publié en 1855 par Évelyne de Balzac, « Le Député d’Arcis » et « Les Petits Bourgeois de Paris », tous deux terminés par Charles Rabou, selon la promesse qu’il avait faite à Balzac peu avant sa mort, et publiés respectivement en 1854 et en 1856.
18 heures : temps journalier consacré à l’écriture, saisi par l’urgence de livrer au monde son inspiration géniale. « Quand je n’écris pas mes manuscrits, je pense à mes plans, et quand je ne pense pas à mes plans et ne fais pas de manuscrits, j’ai des épreuves à corriger. Voici ma vie. »
Balzac ré-écrivait systématiquement entre 7 et 10 fois chaque tome !
Selon la légende, lorsqu’il s’éteignit en 1850 d’une hypertrophie du coeur, son dernier mot fût pour appeler à son secours Bianchon, le médecin de « La comédie humaine ». L’œuvre titanesque avait pris le pas sur le réel.
Lors de ses funérailles, le 21 août, au cimetière du Père-Lachaise, la foule était imposante et comptait notamment de nombreux ouvriers typographes. Alexandre Dumas et le ministre de l’Intérieur étaient auprès du cercueil, avec Victor Hugo, qui prononça l’oraison funèbre :
« Tous ses livres ne forment qu’un livre, livre vivant, lumineux, profond, où l’on voit aller et venir, et marcher et se mouvoir, avec je ne sais quoi d’effaré et de terrible mêlé au réel, toute notre civilisation contemporaine, livre merveilleux que le poète a intitulé Comédie et qu’il aurait pu intituler Histoire […] À son insu, qu’il le veuille ou non, qu’il y consente ou non, l’auteur de cette œuvre immense et étrange est de la forte race des écrivains révolutionnaires. »
L’amour est la seule passion qui ne souffre ni passé ni avenir.
(« Les Chouans »)