Informations :
Titre : Mâchoires
Auteur : Mónica Ojeda
Éditeur : Gallimard
Nombre de pages : 320 pages
Format et prix : broché 21 € / numérique 14.99 €
Date de publication : 20 janvier 2022
Genre : thriller psychologique horrifique
Résumé :
Fernanda, une belle et insolente lycéenne passionnée de littérature et de films d’horreur, se réveille pieds et poings liés dans une cabane au milieu de la forêt équatorienne. Sa kidnappeuse n’est pourtant pas une inconnue : il s’agit de sa professeure de lettres, Miss Clara, une femme hantée par le souvenir de sa mère et harcelée depuis des mois par ses élèves dans un établissement catholique de l’Opus Dei, réservé aux élites de Guayaquil.
Les raisons de cet enlèvement vont cependant vite se révéler bien plus inattendues et complexes qu’une simple vengeance pour les humiliations subies. Un amour qui ne dit pas son nom, une trahison inespérée et les rites secrets d’une bande d’adolescentes intoxiquées par les creepypastas — ces histoires d’épouvante devenues virales sur Internet — composent la trame surprenante et parfaitement maîtrisée de ce thriller psychologique sur la jeunesse, le sexe et la peur.
Mónica Ojeda décrit ici magistralement les relations passionnelles entre mères et filles, entre enseignantes et élèves, entre sœurs et « meilleures amies ». Elle recrée un monde féminin sans limites et sans merci, où le danger et le désir règnent comme une fascinante déesse à deux têtes.
Mon avis :
Voilà une expérience littéraire incroyable ! Un roman que je qualifierai d’OLNI (Objet Littéraire Non Identifié). Je ne suis pas prête d’oublier « Mâchoires »…
Alors, oui, il m’a fallu un temps d’adaptation. J’ai eu du mal à m’habituer au style de l’auteure, à la construction du roman. Plusieurs fois, je me suis demandée ce que je lisais, ce que je fichais là, pourquoi j’avais choisi ce roman, où voulait m’emmener l’auteure.
Tout commence avec Fernanda, une adolescente élève d’une prestigieuse école de Guayaquil, en Équateur, qui se réveille menottée dans une cabane au milieu de la forêt. Elle est séquestrée par Clara, sa prof de littérature.
Retour en arrière, Fernanda nous fait partager son quotidien avec ses amies. Elles apprécient se retrouver dans un bâtiment désaffecté. Annelise, la meilleure amie de Fernanda, pousse le groupe à explorer la nature de la violence et de la terreur à travers son obsession pour les creepypastas et le culte d’une divinité qu’elle baptise « le Dieu Blanc », imaginant des défis qui commencent innocemment, mais qui, au fil du temps, se transforment en rites de plus en plus pervers.
Clara, quant à elle, tente de reprendre pied, après son agression par deux de ses élèves et la mort de sa mère avec laquelle elle entretenait une relation œdipienne. Si vous êtes mère, accrochez-vous…car la maternité est dépeinte sous un angle totalement négatif.
Peu à peu, le lecteur découvre le lien entre Clara et Fernanda et pourquoi l’une en est arrivée à kidnapper l’autre. « Mâchoires » est un roman absolument déroutant, troublant et dérangeant, il explore les racines de la peur, les relations entre les femmes : mère/fille, amie/amie, enseignante/élève, femme/femme et comment elles peuvent passer de la tendresse à la violence, voire à la perversion.
La plume de Mónica est à la fois poétique, précise et audacieuse, car très imagée. A titre d’exemple, Anelise appelle l’adolescence « l’âge blanc ».
L’auteure élabore un thriller horrifique et psychologique, minutieusement construit, énigmatique et bouleversant. Un roman explorant le côté sombre de la féminité, où les hommes sont absents, ou presque. Grâce à un fort pouvoir de suggestion, mélangeant volontiers délire et réalité, utilisant la terreur cosmique dans le plus pur style de Lovecraft, Mónica dépeint les peurs et les réactions de ces adolescentes, occupées à se construire, grandir et apprendre. On retrouve même une référence au body horror, de manière subtile, avec la maladie dont souffrait la mère de Clara. Fascinant !
« Elle n’avait jamais pu dire à sa mère, agonisante sur un lit d’hôpital avec sa colonne transformée en boa, qu’avoir peur de mourir c’était bien pire que mourir tout court. »
Elle repousse encore plus les limites en incluant à son récit ces fameux creepypastas, ces histoires d’horreur publiées anonymement sur internet, généralement fictives, enfin…en théorie, mais sait-on jamais ?
Les dernières pages sont un condensé magistral d’horreur et de suspense. Une immersion dans la nature humaine, dans son côté le plus extrême.
« Mâchoires » joue avec l’esprit du lecteur, brouillant son environnement. C’est extrêmement dérangeant, ce qui en fait un excellent roman d’horreur psychologique. Atypique et envoûtant, je dois bien l’avouer.
Il ne plaira pas à tout le monde, mais, si vous osez tenter l’aventure, je suis persuadée que vous en reviendrez différent. Oserez-vous vous glisser entre ces mâchoires blanches ? Au risque de vous faire broyer ? Ou aimé ?
Je vais rajouter une mention spéciale à Alba-Marina Escalón, la traductrice du roman, qui a réussi à retransmettre toutes les émotions et les particularités de cet ouvrage et de la plume de Mónica.
J’ai eu la chance de participer à une rencontre virtuelle avec Mónica, je vous en reparle très vite !
« Salut, je m’appelle Anne et mon Dieu est une luciole givrée, chanta Annelise en se déhanchant, la main posée sur sa taille. Il dit être mon amant et porte de hauts talons aiguilles. Il met du rouge à lèvres pour m’embrasser la gorge et danser pour moi une lambada rouge quand j’ai le cafard. Sa tenue scintille au petit jour : ses ongles charrient les cadavres des insectes écrasés qu’il a extirpés de ma tête. »
Je remercie Babélio et les Éditions Gallimard pour cette lecture.
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En bref :
Ce qui m’a poussé à ouvrir ce livre : l’envie de découvrir autre chose que les auteurs français ou anglophone, une autre culture, élargir mon horizon de lectrice. Sortir peut-être de ma zone de confort. Le résumé m’a intéressée, j’étais curieuse de voir quel portrait des femmes l’auteure allait présenter.
Auteur connu : Mónica a écrit trois romans, mais « Mâchoires » est le premier traduit et publié en France. J’aimerai beaucoup découvrir ses deux autres !
Émotions ressenties lors de la lecture : énormément de surprise, d’étonnement, la peur a bien vite fait de prendre le pas sur la perplexité, suivie de près par l’angoisse, la crainte, mais aussi la curiosité, la reconnaissance et l’optimisme.
Ce que j’ai moins aimé : la construction et le style au départ ont été un réel frein à ma lecture, mais une fois habituée, ce désavantage s’est transformé en point positif.
Les plus : la plume, fabuleuse, la noirceur du récit, l’imagination débordante de l’auteure, ces femmes à la fois fortes et fragiles, la fin, la construction.

Merci pour ton retour ! J’ai hésité à participer à la masse critique. J’avais peur de ne pas accrocher et de me retrouver dans une impasse au moment de rendre mon avis. Néanmoins, je suis très intriguée et ta chronique me conforte dans l’idée qu’il pourrait me plaire.
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Je t avoue que c etait ma crainte au debut egalement. Et puis non, une fois prise dans l’histoire et habituée au style, c’etait top. Tu me diras si tu te lances ! Belle soiree a toi
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