Informations :
Titre : femmes en colère
Auteur : Mathieu Ménégaux
Éditeur : Grasset
Nombre de pages : 198 pages
Format et prix : broché 18 € / numérique 12.99 €
Date de publication : 3 mars 2021
Genre : roman noir
Résumé :
Cour d’Assises de Rennes, juin 2020, fin des débats (auxquels le lecteur n’a pas assisté) : le président invite les jurés à se retirer pour rejoindre la salle des délibérations. Ils tiennent entre leurs mains le sort d’une femme, Mathilde Collignon. Qu’a-t-elle fait ? Doit-on se fier à ce que nous apprennent les délibérations à huis-clos, ou à ce que révèle le journal que rédige la prévenue qui attend le prononcé du jugement ?
Accusée de s’être vengée de manière barbare de deux hommes ayant abusé d’elle dans des circonstances très particulières, Mathilde Collignon ne clame pas son innocence, mais réclame justice. Son acte a été commenté dans le monde entier et son procès est au cœur de toutes les polémiques et de toutes les passions. Trois magistrats et six jurés populaires sont appelés à trancher. Doivent-ils faire preuve de clémence ou de sévérité ? Vont-ils privilégier la punition, au nom des principes, ou le pardon, au nom de l’humanité ? Avoir été victime justifie-t-il de devenir bourreau ?
Nous plongeons en apnée dans cette salle des délibérations d’un jury de cour d’assises. Neuf hommes et femmes en colère qui projettent sciemment ou inconsciemment sur l’écran de cette affaire le film intérieur de leur propre existence…
Mon avis :
Cour d’Assises de Rennes. Un procès a lieu (pour lequel le lecteur ignore tout), et les jurés se retirent pour délibérer. C’est cette délibération que nous offre Mathieu sur un plateau d’argent. Découvrir les débats, plonger dans cette intimité méconnue.
Le lecteur va pouvoir s’identifier aux six membres du jury populaire. Deux hommes et quatre femmes, de toute classe sociale et de tous âges. Tout le monde peut être convoqué un jour et devenir juré. L’ambiance est lourde et solennelle. Les chapitres où Mathilde, cette mère de famille sur le banc des accusés, se confie peu à peu sous la forme d’un journal intime sont poignants. Elle va prendre de plus en plus d’importance et finira par exprimer ce qu’elle a fait. On ne saura que très tard dans le récit quels sont ses chefs d’accusation. Le lecteur reste le plus possible dans l’interrogation, tel une page vierge tentant de deviner pourquoi le jury se rassemble. Il sait qu’il y a eu « actes de barbarie », mais quelles sont les circonstances, le mobile ? Mathilde est l’accusée, mais elle réclame également justice. Pourquoi ? Qu’est-ce qui a poussé cette mère respectable et respectée, à un tel acte de violence ?
Le sujet du roman, au-delà de l’intime conviction des jurés (qu’aurions-nous d’ailleurs fait à leur place ?), creuse le thème de la légitime défense, de la peine pour l’exemple, de la vengeance. A-t-on le droit de se faire justice soi-même ? La place des femmes dans notre société est également largement fouillée. Grace au mouvement #MeToo, les femmes osent désormais parler. Mettant à mal l’impunité de certains hommes, se croyant jusqu’alors à l’abri de tous soupçons.
Un roman court, mais pourtant d’une richesse absolue. Qui pose les bonnes questions, et qui laisse le choix des réponses au lecteur. Un livre qui hante bien après avoir tourné la dernière page. Une construction en huis-clos, très factuelle, qui n’amène pas vraiment d’empathie vis-à-vis des personnages. On est plus dans le constat, l’accent est mis sur la machine judiciaire, sur la place des médias et des réseaux sociaux dans une affaire médiatisée à l’extrême. Ça se lit comme un reportage, un compte-rendu d’audience.
Si au début, mon avis sur la condamnation de Mathilde était très tranché, j’avoue qu’au fil des pages, ma conviction initiale s’est lentement mais inexorablement effritée. C’est très psychologique en définitive. Mathieu joue à la fois sur l’imagination du lecteur, sur sa projection potentielle en tant que juré, sur son analyse des faits, mais également sur son passé. Car je pense qu’en fonction du vécu du lecteur, sa réaction sera différente.
La plume de Mathieu va à l’essentiel, elle est claire, limpide, insufflant un rythme à l’apparence calme, mais que le lecteur va rendre incroyable. Je parle pour mon cas, en tous cas, car une fois attaqué, je l’ai lu d’une traite. Je n’ai pas pu lâcher cette histoire avant la fin. J’étais happée, curieuse de savoir quel serait le verdict. Les détails juridiques sont une mine d’information, c’est passionnant. Sans jamais être rébarbatif. Ils m’ont permis de mieux comprendre le système juridique français. J’ai aimé également les références cinématographiques, qui m’ont fait sourire et apporte un peu de légèreté à l’ensemble (il y en a bien besoin !).
Quant à la fin, mais quel uppercut ! Un truc de dingue, tout simplement. Je ne parle pas du verdict, qui du coup, devient totalement secondaire. Je parle de la manière dont il a été défini.
Un roman fort, qui bouscule, un huis-clos oppressant et révélateur de notre société malade. Foncez, vous ne pourrez pas regretter une telle lecture !
(Une mise en garde concernant les âmes sensibles, l’un des passages étant assez immonde.)
#FemmesEnColère #MathieuMénégaux #Grasset
En bref :
Ce qui m’a poussé à ouvrir ce livre : l’auteur et la couverture ! Face à ce titre et cette couv’, je me suis interrogée. Le résumé a achevé de me convaincre.
Auteur connu : je l’ai découvert avec « Disparaître » . J’avais bien accroché à ce récit et à sa plume.
Émotions ressenties lors de la lecture : je suis passée par toutes les couleurs ! Mais l’angoisse, la colère et la peur ont pris le dessus sur le reste.
Ce que j’ai moins aimé : RAS
Les plus : le sujet, le huis-clos, les débats magistralement retranscrits, les questionnements qu’imposent une telle lecture, la fin, la plume.
Une réflexion sur “« Femmes en colère » de Mathieu MENEGAUX”